Boké : « le FODEL est à la fois social, économique et local », Abdoulaye Gneïssa

La mise en œuvre du fonds de développement économique local (FODEL) a démarré dans la préfecture de Boké. Où en sommes-nous, que fait le comité d’appui à la gestion du Fodel (CAGF), quel est le niveau d’attribution des marchés aux groupements d’intérêt économiques (GIE) des jeunes et femmes et les défis et perspectives du FODEL sont expliqués dans cet entretien avec Abdolaye Gneïssa, président du CAGF de Boké. Lisez.

Faites-nous un état des lieux de la mise en œuvre du FODEL ?

Le président a pensé à la population de Boké en nous octroyant un montant de 41 milliards 337 millions 282 mille 659 GNF. Le chèque nous a été remis le 23 décembre 2019 devant toute la population de Boké.  Je pense que c’est déjà un acquis important que les populations de Boké n’oublieront jamais.  La mise en place du CAGF au niveau de la préfecture de Boké est un ouf de soulagement.

Ce bureau est constitué de 7 personnes : il y a le représentant du bureau exécutif qui est le président, le représentant de l’administration préfectorale, le représentant des élus au niveau des collectivités de Boké, la représentante des femmes de la préfecture, le représentant des jeunes de la préfecture, la société civile, et enfin le représentant du secteur privé. Le comité a commencé à travailler en 2020.

Nous avons recruté les 4 membres du secrétariat permanent du CAGF (2 au niveau des contrats et du suivi des travaux et 2 autres au niveau des finances et de la comptabilité). Ce qui complète le nombre à 11 personnes qui œuvrent pour la satisfaction des collectivités locales.

Aujourd’hui quel est le mode de répartition des fonds ?

Au niveau des collectivités, il y a une session budgétaire. Et les 10 collectivités de Boké ont organisé leur consultation à la base avant de convoquer les sessions budgétaires au niveau des collectivités. C’est après ces sessions budgétaires que nous nous sommes retrouvés au mois de janvier en présence du comité conjoint qui est à Conakry, le secrétariat permanent et les collectivités pour étudier tous les différents projets qui ont été sélectionnés à la base. Ce, pour voir leur faisabilité. Et on a passé au peigne fin chaque projet, et nous avons retenu certains. Il faudrait que ces projets soient inscrits au niveau du plan annuel d’investissement (PAI) et du plan de développement local (PDL) pour que ça soit financé. Nous sommes dans ce processus de financement pour conclure cette session budgétaire.

Combien de projets ont été soumis et ont bénéficié de financement?

Je retiens seulement les jeunes et femmes de la commune urbaine où nous avons des projets GIE jeunes et femmes et des projets sociaux et économiques. Nous avons cherché à privilégier 22 projets pour les femmes et 28 pour les jeunes, au niveau de la commune urbaine.

Nous sommes en train de signer les conventions d’accompagnement et suivi entre le CAGF et les dix collectivités, et c’est sous la supervision du comité conjoint (MATD et MMG, Ndlr).

Quels sont les défis auxquels vous faites face ?

Les défis qui nous interpellent sont nombreux. Après l’identification des projets, nous devons faire des visites de terrain. Parce que rien ne coûte à un Guinéen de dire qu’il a 5 hectares de lui donner 40 millions GNF, ou 10 hectares en demandant 100 millions. Il faut qu’on vérifie à travers même des filmages. Nous allons faire un tour d’horizon au niveau des dix collectivités, contrôler projet par projet sur le terrain. Au niveau de chaque commune rurale, il y a des comités de suivi des projets FODEL. De la conception du projet jusqu’à la réalisation, nous travaillons avec ces comités de suivi.

Comme le FODEL est un fonds revolving, sans intérêt, combien de temps disposent les bénéficiaires pour rembourser le prêt ?

Chez nous ici, le maximum c’est 3 ans, parce qu’il n’y a pas d’intérêt. D’ailleurs, il y a un certain pourcentage qui revient au porteur de projet. Par exemple, si vous prenez parfois les 40 millions, rien ne coûte au CAGF pour demander à payer 15 millions pour rembourser les 40 millions en trois ans. Donc, 15 millions par an pour les 2 premières années plus 10 millions pour la 3ème année. Voilà comment nous avons adopté avec bien sûr les porteurs de projets.

Quel est le mécanisme innovant dont vous disposez aujourd’hui pour pourvoir suivre tous ces projets afin qu’on ne puisse pas demain enregistrer des fausses notes ?

Le CAGF est bien structuré. Le problème d’argent est confié au représentant de l’administration. Parce que c’est lui qui connait. On dit en langue Sosso de donner le to  à celui qui le connaît.  Au niveau de ces porteurs qui viennent jusqu’ici, il y a d’abord les règlements intérieurs de chaque groupement. Il y a l’agrément. Et si cela n’existe pas, il n’y a pas de pièces qui puissent indiquer que tel projet est réel ou tel porteur est celui-ci. On ne peut donc pas donner des éléments à la base qui nous permettent d’apprécier effectivement la moralité de tel ou tel projet.

Ce n’est pas au CAGF d’attribuer les projets, c’est plutôt aux maires, qui sont responsables de la gestion des fonds. Nous, nous sommes là pour le suivi de la procédure édictée dans le cadre de la gestion des fonds.

Quelles sont les prochaines étapes ?

On a de l’espoir avec l’engouement constaté au niveau des collectivités locales après notre passage à la radio rurale pour expliquer à la population le FODEL.

Est-ce qu’on peut avoir des chiffres sur la répartition des fonds des différentes collectivités ?

D’abord à la base il y a une clé qui repartie les fonds en fonction des communautés impactées. Ça donne un montant total de 41 milliards repartis entre dix collectivités.  Vous remarquerez que chacun dans  sa nature a une clé de répartition dans laquelle il y a 8 rubriques réparties comme suit : il y a les projets d’entreprises et GIE des jeunes et femmes 20% pour chaque groupe. Ce qui fait un total des fonds alloués à la communauté à 40%. 30% du montant est réservé aux projets de développement des localités, notamment les infrastructures communautaires. 21% sont pour les projets sociaux de la commune dans le cadre du PAI. Il y a un appui au fonctionnement des communes rurales et des comités de suivi des projets placés auprès des communautés à hauteur de 3,6%. Le renforcement des capacités à 2,6%, la communication, la vulgarisation et la sensibilisation de l’ensemble du processus pour 0,5% et 2,5% des fonds réservés à la supervision et à l’audit à partir du compte principal. Et le CAGF est dans les 5% réservés à toute l’administration du gouvernement. C’est ce qui complète le total des fonds à 100%.

Nous pensons qu’avec cette procédure et  ses différentes clés, il y a beaucoup plus d’assurance que ce que l’on connaissait avant. C’est pourquoi nous n’avons aucune crainte du suivi et de la gestion parce que le CAGF n’est mêlé à aucune gestion. On n’est ni corruptible ni corrompu parce qu’on ne gère pas. Le CAGF est une coordination indépendante de toute gestion du FODEL. On assimile les collectivités pour une gestion efficiente et transparente et comprenez que la collectivité a droit à l’argent que lorsque le CAGF s’assure de l’efficacité et de l’efficience des projets. C’est ainsi que nous repassons le projet au laboratoire pour que le montant soit financé et remis à la commune. C’est là où nous sommes à la 2ème étape de gestion.

Votre appel à l’endroit des acteurs ?

Nous invitons les jeunes à être conscients. Nous sommes à la phase où nous avons compris qu’il y a eu difficultés d’adhésion des actions ou des activités des jeunes. Nous invitons les jeunes à accéder surtout à la faveur qui leur est accordée. Le FODEL n’est pas un prêt d’une préférence ou d’une banque où on a un problème d’intérêt. Le FODEL est un fonds revolving mais périssable. Il est périssable ou même mourant parce que c’est un fonds qui doit finir dans un cycle  de quatre à six ans, mais qui aurait servi à cinq ou six personnes avant de finir. Parce qu’il faut signaler que tous ceux qui obtiennent ces fonds ont un certain pourcentage en fonction de la manière de rembourser l’argent.

Si vous rendez correctement l’argent, on vous donne 10 à 20% et on prend l’argent pour remettre à une autre personne. Donc si tu en as moins de 20%, celui qui prend pour la 2ème année aussi retire 20%. Il ne restera que 60% au 3ème preneur. Voilà pourquoi il est un fonds mourant. Au lieu de faire une accumulation comme les autres fonds, le FODEL est social avant être économique. Il est encore locale car il n’existe que là où on exploite.

Donc, ce sont les trois vertus du FODEL : social, économique et local. Voilà pourquoi le FODEL doit être intimement embrassé par les jeunes et les femmes.

Mamadou Oury Bah et BM Diallo       

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